“ Avec Chaplin, la tech­nique inven­tée par les frères Lumière est deve­nue un art. ”

Entre­tien avec Fabrice Calzet­toni, respon­sable péda­go­gique de l’Ins­ti­tut Lumière, qui consacre une rétros­pec­tive à Char­lie Chaplin. 

Aussi connu que Mickey

Tous les grands films muets de Chaplin sont abor­dables dès 6 ans, jusqu’au Dicta­teur. Car l’uni­vers de Chaplin est très acces­sible, très enfan­tin – le cirque, l’aven­ture, etc. – et sa façon de faire du cinéma est extrê­me­ment lisible. L’image est hyper­abou­tie du point de vue du sens. On disait déjà à son époque qu’il pouvait être vu par n’im­porte qui, de n’im­porte quel âge, dans n’im­porte quel pays. Il était l’homme, la silhouette, le visage, les plus connus du monde. 

L’art du burlesque

Il a inventé plein de procé­dés comiques. Avec lui, le burlesque consiste à briser des inter­dits. Il crée un person­nage de méchant qui, quand il a faim, n’hé­site pas à piquer une pomme à un enfant ! Pour les enfants, à qui on dit sans cesse “ fais pas ci, fais pas ça ”, c’est un vrai bonheur. Chaplin prenait des situa­tions très conven­tion­nelles et les faisait explo­ser en vol. Dans Les Temps modernes, il trans­forme un rituel méca­nique, visser des boulons, en anar­chie totale. Char­lot a faim dans La Ruée vers l’or  ? Il mange sa chaus­sure ! 

Des actions univer­selles

Du burlesque pur – la tarte à la crème – au mélo­drame pur, il met en scène des rapports entre personnes qui sont univer­sels : aimer quelqu’un, ne pas se lais­ser faire par un agent de police quand on n’a rien fait. L’his­toire des Temps modernes est celle d’un homme qui cherche du travail pour manger. 

Un sens du récit inégalé

Chaplin avait un sens du récit qui n’a jamais été égalé dans l’his­toire du cinéma. Ou peut-être par Spiel­berg. Sa mise en scène était calcu­lée à la micro­se­conde près. C’était un grand perfec­tion­niste. Comme il avait gagné beau­coup d’argent, il était son propre produc­teur et avait une liberté totale. Le métrage de la pelli­cule lui était indif­fé­rent : il tour­nait jusqu’à obte­nir une parfaite lisi­bi­lité. Les Lumières de la ville a néces­sité deux ans de tour­nage !

De Char­lot à Char­lie. Du 12 décembre au 4 janvier.

Anne-Caro­line Jambaud