En 1969, le réalisateur Nagisa Oshima poursuit son exploration des laissés-pour-compte de la société japonaise et filme, à hauteur d’enfant, un fait divers saisissant.
Un père, soi-disant blessé à la guerre et souffrant de diabète, oblige sa femme et son fils de dix ans à faire semblant d’être heurtés par une voiture dans le but d’extorquer un dédommagement à l’automobiliste. L’arnaque nourrit la famille mais l’oblige à changer de ville sans cesse.
Dans ce road-movie qui couvre le Japon du sud au nord, Oshima prend soin d’adopter la plupart du temps le point de vue de l’enfant. Forte tête, manipulé par son père, imperméable à la douleur physique, formé au mensonge mais conscient de sa marginalité, ce petit garçon sensible peine, encore plus que les adultes autour de lui, à trouver un véritable sens à sa vie.
Enfermé dans cette situation comme il l’est dans un Japon dont il apprend à connaître les frontières, il est la conscience éclairée de ce film fort et témoigne d’une lucidité troublante, alors même que c’est lui qui est le plus en danger.
Oshima signe ici la chronique cruelle d’un Japon en plein développement, mais qui ne semble pas avoir réglé ses comptes avec son passé, ni bien anticipé son avenir.