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Ensei­gner en banlieue, loin des clichés

Publié le 08/09/2021

Titu­la­risé en 2017, le Villeur­ban­nais Loïc Malfroy a dû se résoudre, comme nombre de jeunes collègues, à partir ensei­gner l’édu­ca­tion physique et spor­tive en Seine-Saint-Denis pendant un an. Exerçant aujourd’­hui en banlieue lyon­naise, il raconte son expé­rience dans un livre très person­nel, dépouillé de tout cliché.

Pourquoi avoir écrit ce livre ?
Au bout d’un an en Seine-Saint-Denis, quand je suis rentré dans l’aca­dé­mie de Lyon, j’ai réalisé qu’il y avait un déca­lage énorme entre la réalité de mon expé­rience et ce que j’avais cru vivre au départ. J’ai voulu racon­ter cette expé­rience et parler aussi de ce que c’est que démar­rer le métier d’en­sei­gnant, que tout le monde croit connaître. Mon but n’est pas de dénon­cer, mais de parta­ger ce que j’ai vécu le plus sincè­re­ment possible.

Vous expliquez très bien le proces­sus d’af­fec­ta­tion après la titu­la­ri­sa­tion et comment ce départ en Seine-Saint-Denis appa­raît comme une étape obli­gée.
D’une disci­pline à une autre, ça ne se passe pas pareil. Selon les acadé­mies, il y a des disci­plines qui sont plus deman­dées que d’autres. Par exemple, en maths, si on commence sa carrière en tant que stagiaire dans l’aca­dé­mie de Lyon, on pourra y rester ensuite car la demande est très impor­tante. Mais c’est impos­sible pour la majo­rité des autres matières, car cette acadé­mie est très deman­dée. A contra­rio, l’aca­dé­mie de Créteil dont dépend la Seine-Saint-Denis l’est très peu…

Dès le début de votre livre, vous avouez vos préju­gés quant à la Seine-Saint-Denis. D’où venaient-ils ?
Je pense que cela tient beau­coup aux médias qui relaient un nombre impor­tant de faits divers dans ce dépar­te­ment. Comme il y a une détresse sociale plus forte, je pense que des choses plus graves s’y passent et on en parle donc plus. Et puis, en tant que futur prof, on sait qu’il y a beau­coup plus de zones d’édu­ca­tion prio­ri­taire (REP) là-bas. Tout ça parti­cipe à nour­rir les préju­gés. Avant d’y aller, j’ai fait mon stage en REP à Vénis­sieux, où les élèves étaient déjà un peu compliqués. Je me disais que ce serait encore plus diffi­cile en Seine-Saint-Denis. Il y a toujours l’idée que c’est plus dur là-bas.

Mais vous dites qu’au-delà des problèmes de disci­pline, c’est surtout la détresse sociale qui vous a choqué.
Malheu­reu­se­ment, les moyens qu’on nous four­nit en REP ne sont pas suffi­sants pour endi­guer ce que peuvent vivre les élèves et leur famille au quoti­dien. Parfois, ce n’est pas le manque de respect d’un élève envers son ensei­gnant qui est le plus dur à gérer, mais plutôt le déca­lage entre ce que l’en­sei­gnant consi­dère comme normal venant de l’élève et ce que cet élève peut réel­le­ment four­nir au regard de sa situa­tion fami­liale.

Pensez-vous que le fait d’en­sei­gner l’EPS ait été une chance, par rapport à d’autres matières comme le français ou l’his­toire-géogra­phie?
Indé­nia­ble­ment, ça présente des avan­tages. On sort du cadre scolaire où l’élève doit rester assis sur une chaise à écou­ter parler le prof pendant une heure. On peut rattra­per certains élèves qui sont en décro­chage par ailleurs. En revanche, on doit les gérer dans l’es­pace. Si jamais il y en a trois qui font n’im­porte quoi au fond du gymnase, on ne peut pas se divi­ser en deux. Cela peut donner lieu à des acci­dents.

Vous poin­tez aussi des problèmes de disci­pline à Meyzieu (69) où vous ensei­gnez désor­mais. C’est fina­le­ment un point commun avec votre année dans le 93…
Cela me parais­sait très impor­tant de dire que la Seine-Saint- Denis n’a pas le mono­pole des problèmes de disci­pline. À Meyzieu, l’en­vi­ron­ne­ment de mes élèves n’est pas le même : il n’y a pas de détresse sociale aussi impor­tante, même si elle existe pour certains. Mais la grande diffé­rence, c’est que le collège n’est pas en REP. On a donc à gérer 30 élèves, contre 24 en REP. Et dans le 93, entre les dispenses et les absences, je n’avais des groupes que de 20 élèves. Ça ne parait pas grand-chose, mais 10 élèves, c’est énorme !

Cette année en Seine-Saint-Denis n’a-t-elle fina­le­ment pas été une sorte de super stage de forma­tion ?
Ce fut évidem­ment très forma­teur, mais je trouve qu’il y a des manières plus douces d’ap­prendre. On est constam­ment en train de réagir, c’est assez brutal.

Vous évoquez ces instants de compli­cité avec vos élèves, que vous appe­lez des « moments d’étoiles ». En avez-vous toujours ?
Je pense que j’en aurai partout, quel que soit le terri­toire, car c’est le cœur de mon métier. Mais c’est vrai qu’ils sont encore plus puis­sants lorsqu’on a le senti­ment d’avoir vrai­ment apporté quelque chose à l’élève. Peut-être qu’il l’aura oublié une semaine après, mais sur l’ins­tant, c’est magique.

Vis ma vie de prof

Loin d’être un jour­nal de bord, le livre-témoi­gnage de Loïc Malfroy a été écrit avec plus d’un an de recul sur l’ex­pé­rience qu’il a vécue en Seine-Saint-Denis. Qu’il évoque les condi­tions d’exer­cice de son métier, la situa­tion de ses élèves ou encore la force du collec­tif formé par ses collègues, il le fait toujours avec une sincé­rité et une huma­nité touchantes, porteuses d’es­poir sans verser dans l’an­gé­lisme.page47image40226368

Un an en Seine-Saint-Denis, témoi­gnage d’un prof d’EPS débu­tant !
de Loïc Malfroy. Autoé­di­tion. 250 pages. 12,90€. Points de vente sur loic-malfroy-auteur.com et chez-mon-libraire.fr

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