Avec ses chansons à textes qui ne mâchent pas leurs mots sur des tonalités rock, Reno Bistan s’est fait une sûre et certaine réputation sur la scène lyonnaise. C’est avec le même engagement, une bonne dose d’humour et d’humanité, que le chanteur a conçu un spectacle spécialement dédié aux enfants. A découvrir aux Fêtes escales de Vénissieux le 14 juillet.
On connaissait votre parcours de chanteur engagé, mais on ignorait que vous vous produisiez également devant les enfants. Quelle a été la motivation de ce concert ?
Reno Bistan: Quand je fais des concerts, je suis parfois amené à faire de l‘action culturelle, notamment dans les écoles et les collèges avec des ateliers d’écriture. C’est en coécrivant des chansons avec les enfants que je me suis rendu compte qu’il y en avait plein de supers et que ce serait cool d’en faire quelque chose!
Comment se déroulent ces ateliers?
Avec les enfants, on se met devant un tableau, on discute de certains sujets, puis on fait passer un bâton de parole et moi je prends des notes. Je m’inspire pas mal de leurs idées et fais une chanson en essayant de rester fidèle à ce qu’ils racontent.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous adresser aux enfants?
C’est un public très agréable avec qui on peut se raconter plein de trucs. Ils sont là, dans l’instant présent, et les thématiques qu’on aborde les font souvent beaucoup réagir. Elles me tiennent à coeur et j’aime voir comment des jeunes gens s’en emparent, quelle vision ils en ont.
Sur un tas de sujets, il y a plein de choses qui leur paraissent naturelles alors qu’elles peuvent faire bloquer les adultes. Notamment quant à l’évidence d’être ensemble malgré les différences apparentes. Et puis, avec les gamins, si ça ne leur plait pas, c’est cash!
Quelles sont ces thématiques que vous abordez avec eux ?
Il y a des chansons très axées sur le quotidien à l’école. Par exemple une chanson sur la cour de récré avec une description méthodique depuis le moment où ça sonne, le moment où le maître vient dire de se mettre en rang, jusqu’à l’explosion de liberté et le gros délire de la récré.
Il y a la chanson Mes parents sont toujours sur des écrans, où je prends le truc à l’envers. Là, c’est le gamin qui voit toujours ses parents collés à leur écran. Ca, ça leur parle pas mal en général! Il y a des réactions: “Ah ouais carrément! Ma mère à chaque fois elle est sur son écran sur le canap!”
Je parle aussi d’un enfant qui n’aime pas que son père s’exprime comme un ado et lui dise “wesh gros ?” tous les matins. Du côté un peu engagé, il y a aussi la chanson du gamin qui demande aux parents d’aller à pieds à l’école car il trouve ça trop naze d’y aller en bagnole!
Toutes ces chansons proviennent-elles des ateliers d’écriture menés dans les écoles?
Non, pas seulement. Le répertoire se compose également de quelques chansons que j’ai écrites seul, sur des thématiques de l’enfance qui m’intéressaient. Il y en a aussi que j’ai écrites spécialement pour une personne rencontrée en particulier en mode portrait.
Par exemple, il y a une chanson en lien avec la vie d’une jeune fille originaire du Kosovo et qui parle des étés où elle retourne dans son autre pays. Je l’ai écrite pour elle, à partir de ses souvenirs de vacances; c’est une histoire assez touchante.
Quel est le message de cette chanson en particulier?
Ça pourrait être le fait qu’on a tous plusieurs endroits dans le cœur et dans les pensées. Qu’on ait des grand-parents à Grenoble ou des cousines au Kosovo. C’est juste universel.
On a parlé des textes. Et la musique alors?
C’est quand même bien énergique ! On joue en mode trio rock, avec le batteur Rémy Kaprielan, Claudine Pauly au clavier qui envoie des sons… et, puis moi, le chanteur un peu rigolo-écolo qui joue aussi de la guitare.
On a des arrangements plutôt cool je crois, qui ont été réalisés par Nicolas Steib avec lequel je travaille en studio… C’est très musique actuelle.
Dans le contexte actuel, votre spectacle aura-t-il une résonance particulière aux Fêtes escales?
Je suis pas mal engagé dans ma vie. Parfois, j’écris aussi des articles politiques. Mais mes projets musicaux sont comme différents médias qui me permettent de raconter les choses d’une autre manière.
Dans les thématiques du concert jeune public que nous allons donner aux Fêtes escales, il s’agit plus de faire un pas de côté, de questionner certaines évidences en regardant le monde à travers les yeux d’enfants plutôt que d’être dans un message frontal.
Je pense qu’en dehors d’un discours direct et d’opposition qui reste nécessaire bien sûr, surtout en ce moment, il y a aussi la nécessité de se dire: “La société qui nous plaît, c’est celle-là!” Et « Voilà aussi ce qui nous fait marrer, ce qu’on tourne en dérision. »
Auprès des plus jeunes, je veux porter cette idée que les choses sont comme ça, mais pourraient tout à fait être autrement, donner vie à d’autres imaginaires. Faire en sorte que ce monde et cette société auxquels on aspire se mettent aussi à exister à travers ce qu’on raconte.
Par exemple prendre les transports en commun ou le vélo, poser un peu nos bigos pour être plus attentifs les uns aux autres, ce n’est pas une punition et ça peut même être très enthousiasmant.
Au final, je ne sais pas s’il faut dire que ce concert est engagé. C’est un concert qui porte des sujets de société où se croisent mon regard, et celui des enfants que j’ai rencontrés.
Concert En direct de la récré, le dimanche 14 juillet 2024 à 11h30 au parc Dupic, Vénissieux. Durée: 1h. Gratuit.
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