Naturaliste passionné, l’auteur jeunesse Gwenaël David a longtemps étudié les libellules à Lyon.
Vivant désormais dans le Jura, il publie les deux premiers tomes de Sur les traces, une nouvelle
collection de romans documentaires. Avec une sensibilité et une conscience politique forgée par
son enfance à Madagascar, il y met en scène trois adolescents partant découvrir des animaux du
monde entier.
Les trois ados de Sur les traces partagent «une fascination pour la faune à préserver». La protection de la nature est-elle au centre de cette collection ?
C’est d’abord trois adolescents qui vivent leur désir de rencontre d’une espèce. Je voulais inscrire cela dans le réel : pour rencontrer un animal, il faut d’abord aller sur le territoire. Dans le tome 1 Tala le chimpanzé, les personnages sont au Congo. Là, ils vont repérer des indices, des poils, des empreintes, éviter les obstacles en grimpant aux arbres… Ils se soumettent à la réalité de l’animal, doivent adopter son point de vue pour le trouver… Petit à petit, ils se mettent à penser comme un chimpanzé ! Ce déplacement du regard m’intéresse beaucoup. On n’imagine pas à quel point ça nous bouge. Essayer de penser comme l’animal développe l’empathie, ce qui est un bon point de départ, je crois.
Qu’est-ce qui vous a amené à écrire Sur les traces ?
Ce projet est une commande de mon éditrice. Connaissant mon écriture et ma passion naturaliste, elle me l’a proposé et ça s’est fait de manière intuitive. La série s’adosse à la grande collection Mondes sauvages, dont chaque numéro part à la découverte d’une espèce animale, éclairée par un·e scientifique. Tala le chimpanzé est ainsi adossé au documentaire Chimpanzés, mes frères de la forêt de la primatologue Sabrina Krief; Sereno le cachalot, sur le texte Le retour de Moby Dick de l’océanographe François Sarano…
Comment intégrer l’exactitude scientifique sans rendre le tout indigeste pour les enfants ?
Les textes de Mondes sauvages sont parfaits pour comprendre et peuvent être lus par des enfants. Toutefois je souhaitais limiter le surplomb pédagogique. Je ne voulais pas dire aux petits «Je vais
t’apprendre quelque chose», mais plutôt leur donner envie d’aller vivre des aventures. Sur les traces est donc une fiction, qui s’inscrit dans une justesse car elle est relue par les scientifiques. La portée
pédagogique reste présente en creux : pour trouver l’animal, les héros se sont documentés, ils recherchent et analysent les traces… À la fin du livre, on fait se rencontrer les personnages et le·la scien-
tifique qui a collaboré à l’écriture. J’en suis très content car on joue vraiment le jeu : Sabrina Krief s’adresse aux personnages comme elle le ferait avec des enfants.
Sur les traces fait écho à votre propre enfance au milieu des animaux…
J’ai grandi à Madagascar. Jusqu’à l’âge de 14 ans, j’ai côtoyé des caméléons et des lémuriens dans un pays animiste, avant de vivre mon adolescence au Congo. Je pense qu’on se forge beaucoup avant 14 ans dans son rapport à soi et au monde. C’est pareil pour les héros de Sur les traces. Dans le tome 1, ils sont dans la forêt où ils observent des coupes intensives d’arbres. Dans le tome 2, ils suivent Sereno le cachalot, menacé par les nombreux bateaux. Les personnages se posent alors des questions et se disent que ce monde-là est bien impacté par l’Homme… Ce sont des premières considérations presque politiques qui émergent à cet âge-là.
Est-ce cette perception de l’enfance où s’épanouit l’amour de la nature et des animaux qui vous a porté vers le métier d’auteur jeunesse ?
Oui. J’essaie de transmettre une passion. Ça m’émeut toujours quand quelques enfants jouent au bord d’une prairie et vivent des aventures pas possibles. Dans ces moments-là, on expérimente des choses extraordinaires : on explore la savane, la forêt, on découvre la vie et on se découvre soi-même… J’y vois aussi un côté politique : on nous répète qu’il faut se reconnecter à la nature. C’est une idée merveilleuse, mais comment on fait ? Eh bien, il faut aller à sa rencontre. Avec Sur les traces, on dit aux jeunes lecteurs: «Ce monde est à vous, allez en prendre la mesure !»
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Sur les traces, de Gwenaël David, illustrations de Léa Roch. Tome 1 Tala le chimpanzé. Tome 2 Sereno le cachalot. Éditions Hélium. À partir de 9 ans. Tarif : 14,90€.
Propos recueillis par Louise Reymond • Photo d’ouverture: Tala le chimpanzé © Gwenaël David et Léa Roch.
