Si Susie Morgenstern n’existait pas, il faudrait l’inventer. Installée en France depuis plus de 40 ans, cette Américaine à l’accent chantant, auteure de 120 livres traduits dans une trentaine de pays, nous régale d’histoires d’amour et de familles qu’elle saupoudre d’humour. À Bron, elle viendra présenter Mr Gershwin : Les gratte-ciel de la musique, album-CD illustré par le Lyonnais Sébastien Mourrain, primé à Montreuil. Rencontre avec une grande dame de la littérature.
À quel âge avez-vous commencé à écrire ?
Petite, avant de savoir écrire, je remplissais des cahiers de boucles, puis j’ai commencé à écrire un journal vers 7 ans. Ensuite j’ai écrit pour mes enfants, avant d’écrire pour tous les enfants.
L’amour, l’amitié, la famille, les rencontres sont toujours au cœur de vos livres…
Je ne sais pas écrire de l’héroïc fantasy ou de la science-fiction. Je suis très proche de mes personnages, ils sont dans ma peau et je suis dans la leur. Je mets peut-être un peu trop de moi-même et de mon expérience dans mes livres, j’ai l’impression que je n’ai pas d’imagination, qu’il faut que je vive quelque chose pour l’écrire.
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Je suis en train d’écrire le deuxième volet d’une série illustrée pour ados qui s’appelle Le Grand Roman de ma petite vie (La Martinière jeunesse). C’est autour d’un personnage qui s’appelle Bonnie, qui vit avec sa mère et sa grand-mère. Je prépare un livre sur les comédies musicales, je continue la série La Famille trop d’filles (Nathan) qui marche très bien, j’ai une idée de livre avec un personnage qui n’aime qu’une chose : faire le ménage, et je viens d’écrire mon autobiographie de quand j’avais 10 ans que je vais illustrer moi-même.
Comment travaillez-vous ?
J’ai un grand panneau avec mon slogan préféré (emprunté à Nike) : Just do it ! J’écris tous les jours. Avant, j’écrivais à la main dans des carnets, mais j’écris de plus en plus à l’ordinateur. Je suis une junkie d’internet, mon petit-fils de 19 ans me montre tous les tuyaux et j’utilise les mails toute la journée.
Êtes-vous toujours dans l’attente de la fin de vos livres ?
Oh oui, je suis dans l’attente et l’angoisse de savoir comment va finir l’histoire que je suis en train d’écrire. Quel confort ce serait de pouvoir faire un plan, au lieu de ça, je tourne et retourne dans mon lit en me demandant : qu’est-ce qui va se passer, qu’est-ce qu’il faut faire ?
Combien de temps mettez-vous pour écrire un livre ?
S’il s’agit de la série La Famille trop d’filles, c’est un mois. Pour Le Grand Roman de ma petite vie, j’ai mis un an et demi. Lettres d’amour de 0 à 10 a nécessité 4 ans. Pour Gershwin, c’était tourmenté car je cherchais un angle, j’ai eu l’idée de raconter l’histoire de ce musicien par le biais de son piano, mais je l’ai recommencée de nombreuses fois. Je suis très contente du résultat et des illustrations de Sébastien Mourrain.
Pendant la fête de Bron, vous allez donner une conférence dessinée avec lui…
Je vais lire, il va dessiner à côté de moi et ses dessins seront projetés sur le mur.
Vous étiez présente lors de la première Fête du livre de Bron, vous revenez cette année, qu’est-ce qui a évolué dans votre écriture en 30 ans ?
Aujourd’hui j’écris sans arrêt, je suis beaucoup plus pressée car je sais que je n’ai plus tout mon temps. Ce qui m’intéresse c’est l’enfant, son épanouissement et comment y arriver. Je suis toujours militante pour la lecture, je veux à tout prix écrire des choses que les enfants auront plaisir à lire.
Comment la littérature jeunesse a-t-elle évolué en 30 ans ?
Quand j’ai commencé, la plupart des livres pour la jeunesse étaient des traductions, les éditeurs achetaient des titres aux États-Unis et en Angleterre, où ils sont très forts. À L’École des Loisirs en France, Geneviève Brisac a lancé beaucoup d’auteurs. La création s’est développée, il y a beaucoup d’écrivains pour la jeunesse aujourd’hui.
Quel est le livre qui vous a le plus marquée ces 30 dernières années ?
Nos étoiles contraires (Nathan), parce que c’est tout l’art américain de traiter un sujet tellement grave avec humour et une intrigue. C’est une sorte de modèle.
À quoi sert la littérature aujourd’hui ?
À se poser, se concentrer, s’identifier, se fortifier, à lâcher son téléphone portable. J’ai tellement pitié des gens qui n’aiment pas lire que je me donne du mal pour les convaincre. Les fêtes du livre font beaucoup pour la lecture, tout comme les rencontres dans les écoles. Quand je vais dans les classes, je fais un pacte avec les élèves pour que chacun lise 10 ou 20 livres.
Quel est votre rêve le plus fou ou le plus doux ?
Quand on a des enfants, c’est toujours à eux que l’on pense en premier, à leur santé et leur bonheur. Je n’ai plus tellement de rêves pour moi sauf d’écrire un très très bon livre. Le succès que je rencontre est au-delà de mes espérances. La vie est belle, la vie est pleine d’espoir. Et le bonheur est une chose très simple.
Propos recueillis par Blandine Dauvilaire
* Les Rencontres
Samedi 5 mars
• Véronique Ovaldé lira des extraits de son dernier album, Paloma et le vaste monde (dès 6 ans), hymne à la liberté et à l’imagination primé à Montreuil.
• Natali Fortier revisitera le conte Hansel et Gretel avec ses héros Marcel et Giselle, le temps d’une lecture haute en couleurs (dès 5 ans).
• Olivier Douzou, Sylvie Garcia et Olivier Pillé évoqueront le travail des Éditions du Rouergue (invitées de cette 30e Fête du livre), dans une conférence destinée aux parents.
• Une rencontre avec l’auteur Olivier Douzou donnera aussi un aperçu de son travail en atelier (pour ados et adultes).
Dimanche 6 mars
• Tom Haugomat, Maylis de Kerangal et Adrien Parlange répondront à la question : « qui arrive en premier, le texte ou l’image ? » (pour ados et adultes).
• Alex Cousseau et Valie Le Gall liront à deux voix des extraits de leur dernier roman Je suis née sous la terre / Je suis née sous l’eau (dès 8 ans).
• L’illustrateur Gilles Bachelet racontera de manière désopilante Les Coulisses du livre jeunesse (dès 7 ans), la rencontre sera accompagnée d’une expo.
• Alex Cousseau parlera aux ados de son nouveau roman d’aventures Le Fils de l’ombre et de l’oiseau (dès 12 ans).
* Les ateliers sur inscription
Quatre auteurs et illustrateurs animeront des ateliers durant le week-end : atelier gourmand de Marcel et Giselle avec Natali Fortier (dès 6 ans) ; atelier empreintes avec Junko Nakamura pour recréer les animaux de l’album Cinq amis (dès 5 ans) ; atelier Pyjamarama avec Frédérique Bertrand pour réaliser des images animées (dès 8 ans) ; atelier d’écriture avec Hélène Gaudy (dès 6 ans). Sans oublier les ateliers artistiques dans les caravanes installées à l’extérieur.
* L’espace tout-petits (3 mois à 5 ans)
• Outre une garderie, ce coin propose des animations spécifiques pour les plus petits : Malika Doray animera une rencontre-atelier avec les 2–4 ans pour découvrir son univers poétique et créer un petit livre en papier. Elle donnera aussi lecture de son ouvrage La Vie est une berceuse (dès 4 ans).
• Contes, comptines, spectacles seront aussi au programme.
* L’espace des Éditions Grains de Sel
Rentrez dans le décor de Sébastien Mourrain qui a illustré l’histoire longue du tout nouveau magazine Georges, le N° Montre et venez fabriquer un réveil en papier dans l’atelier de Philémon Trépignard, héros de cette histoire.
Accès libre en continu, atelier gratuit dès 7 ans, en famille.
* Concours-Photo « Mon livre préféré ! »
Nous avons tous lu des livres qui comptent plus que d’autres ! Des albums, des romans qui ont accompagné notre enfance, notre adolescence… À l’occasion de ses 30 ans, la Fête du livre et Grains de Sel vous invitent à partager vos coups de cœur : participez au concours-photo « Mon livre préféré ! ».
Blandine Dauvilaire