Le Musée gallo-romain de Fourvière souffle ses 40 bougies et rend hommage au drôle d’architecte qui l’a conçu : Bernard Zehrfuss (1911–1996). Pour ce faire, Christine Desmoulin (critique d’architecture spécialiste de l’artiste) a conçu une exposition qui rappelle le parcours et les principaux projets de cet homme aux idées si modernes pour son époque.
Grand prix de Rome en 1939, Zehrfuss contribue à la reconstruction de la Tunisie après la guerre, puis de retour en France, s’attelle aux logements et immeubles de bureaux. Expérimentateur inspiré, il conçoit avec une poignée d’ingénieurs le plan d’aménagement du quartier de la Défense à Paris, construit le Cnit (plus grand palais d’exposition du monde), dont la spectaculaire voûte en éventail de béton armé est une prouesse mondiale. Il participe également à la création du siège de l’Unesco, immeuble en « Y » porté par 72 piliers de béton dont les façades incurvées sont habillées de brise-soleil.
En 1967, l’architecte dessine les premières esquisses du Musée gallo-romain de Lyon. La ville, qui veut se doter d’un outil culturel à rayonnement international pour présenter ses collections archéologiques, a besoin d’un projet fort et inédit. Bernard Zehrfuss propose un bâtiment enterré qui s’efface au profit du site : cette cathédrale de béton sera l’illustration de « l’architecture invisible » qu’il défend. Construit entre 1972 et 1975, le musée est une structure en béton brut constituée d’arcs-boutants, de grands piliers centraux, de portiques, d’une rampe hélicoïdale inspirée du musée Guggenheim de New York, et d’un escalier à vis qui perce un plafond à marguerite et déroule ses pétales de béton. L’architecte a imaginé chaque vitrine, chaque orientation de mosaïque, ainsi que des canons de lumière pour révéler le site ou éclairer le fond du musée.
En célébrant l’artiste au cœur même de sa création, l’exposition rend son travail encore plus vivant. Si le parcours constitué de photos d’archives, de croquis, de maquettes et de quelques vidéos est un peu aride pour les enfants, un livret-jeu gratuit permet de rendre la visite plus ludique. Sans oublier les collections permanentes traversées au passage. Espérons que grâce à cette exposition, les Lyonnais sauront enfin qui est l’auteur de cet étonnant musée.
Blandine Dauvilaire