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Enfants sans toit à Lyon
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À Lyon, 320 enfants sans toit et des écoles sur le front

Mis à jour le 12/01/2024

Alors que les températures chutent, à Lyon 7e, une famille de six enfants âgés de 1 an à 11 ans dort dehors. L’école François-Auguste Ravier, où sont scolarisés quatre d’entre eux, a décidé de les accueillir pour la nuit, rejoignant la longue liste des écoles jouant le rôle d’hébergement d’urgence. Avec 320 enfants sans abri dans la métropole de Lyon, le collectif Jamais Sans Toit dénonce « un système en train de craquer. »

Une caravane de tôle fine, six mètres carrés pas plus, d’allure sinistre sous la pluie de décembre. Sans eau, sans électricité ni mode de chauffage. C’est là, place Jean Jaurès à Lyon 7e, que dort la famille Zlotéa-Dobre. Les parents à même le sol; les six enfants entassés sur les banquettes humides. Ils ont 1, 3, 6, 8, 9 et 11 ans et quatre d’entre eux sont scolarisés à l’école François-Auguste Ravier, de l’autre côté de la place. « Quand ils sont arrivés en août, je pensais qu’ils trouveraient vite un logement, se souvient le directeur de l’école Michel Patras. Mais le temps passe, le froid arrive et rien n’a bougé. »

Enfants sans toit, l’impuissance générale

La famille originaire de Roumanie, en situation régulière et dont le père travaille, attend un logement depuis plusieurs mois. Avec l’arrivée des températures négatives, les nuits sont difficiles. Les enfants tombent souvent malades et subissent l’insécurité, des clients du Tank bar d’à côté s’amusant à taper sur la caravane la nuit, effrayant les petits. Une situation qui a poussé fin novembre le directeur et La Fédération des Conseils de Parents d’Elèves (FCPE) à interpeller la maire du 7e Fanny Dubot pour mettre la famille à l’abri.

Sa marge de manœuvre est pourtant mince: aucun logement social n’est disponible et les hébergements d’urgence sont engorgés. « La famille est connue de l’ensemble des acteurs tant au titre de l’hébergement que dans le cadre des missions de la Maison de la Métropole », assure la maire. Une réponse décevante pour Michel Patras et le FCPE, qui suggèrent à leur élue, au mieux, d’ouvrir des bâtiments municipaux qui pourraient servir d’abris temporaires pour la période hivernale, au pire de monter au créneau.

« Nous avons bien conscience que le logement n’est pas sa compétence. Mais qu’elle interpelle au moins le Préfet, qu’elle le médiatise », s’émeuvent en cœur le directeur et une parent d’élève en citant l’exemple de Marie-Charlotte Garin. Le 9 novembre, la députée du Rhône avait passé la nuit dans une école pour dénoncer le nombre grandissant d’enfants à la rue.

À l’école Ravier, une solidarité citoyenne

C’est ce que s’est résolue à faire l’école Ravier. En lien avec le collectif Jamais Sans Toit qui occupe depuis 2014 les écoles pour mettre les familles à l’abri et interpeller les pouvoirs publics, elle accueille la famille Zloéta-Dobre pour la nuit. La Ville l’autorise, à condition qu’ils ne soient pas seuls dans l’enceinte de l’établissement. Des enseignants et parents d’élèves se relaient alors pour dormir à l’école.

Mais les week-ends et pendant les vacances, les enfants retournent à leur caravane. « Quand arrive le vendredi, à 16h30, c’est compliqué de les voir partir sous la pluie, témoigne le directeur. Je ne peux pas rentrer chez moi et me mettre les doigts de pieds en éventail en sachant que j’ai quatre élèves qui dorment dehors par -1°. »

Alors, pour offrir quelques nuits d’hôtel à la famille pendant les vacances de Noël, un goûter solidaire est organisé à l’école mardi 5 décembre à 16h30. Une cagnotte en ligne a également été ouverte. Une solidarité citoyenne sincère, mais qui ne réglera pas le problème selon Michel Patras.

« C’est un peu facile de se dédouaner sur les enseignants et parents d’élèves de bonne volonté, regrette-t-il. M. Macron avait déclaré dans sa campagne “plus un Français dans la rue”; M. Doucet avait dit “plus un enfant dans les rues de Lyon”: trois ans après, c’est pire que jamais. Car on n’est pas la seule école face à cette problématique: c’est pareil à Cavenne, à Gilbert Dru… C’est un phénomène qui prend des proportions folles. »

Quand les écoles deviennent des hébergements d’urgence

Selon le dernier recensement du collectif Jamais Sans Toit, 320 enfants dorment dans la rue dans la métropole de Lyon. Une situation « catastrophique au regard des années précédentes, affirme Raphaël Vulliez, porte-parole du collectif. On est à + 40% d’élèves à la rue par rapport à l’an dernier et +240 % par rapport à il y a deux ans. »

Actuellement, quinze établissements scolaires sont occupés dans l’agglomération pour pallier le manque d’hébergements d’urgence et un tiers des enfants sans toit sont hébergés dans dix écoles. Lundi 4 décembre, l’école Renan a rejoint la liste des écoles occupées, hébergeant une famille de trois enfants âgés de 1 mois à 3 ans.

Lire aussi sur Grains de Sel: Jamais sans Toit : des parents au chevet des enfants sans-abri

L’année dernière, neuf-cent nuits d’occupation ont été recensées à Lyon. Depuis la rentrée, 16 000€ ont été dépensés en nuits d’hôtel. « La générosité citoyenne vient pallier le manquement de l’Etat et dormir à l’école devient une option acceptable, constate Raphael Vulliez. On a l’impression de faire office de dispositif officieux dont les pouvoirs publics s’accommodent. Ce n’est pas le rôle qu’on voulait jouer à la base. »

Pourtant, « le gouvernement n’a jamais créé autant de place en hébergement d’urgence. Mais la pauvreté s’est installée et toute la chaîne du logement est en train de craquer, explique le porte-parole. Des publics qui étaient pris en charge en priorité auparavant ne le sont plus. »

Enfants sans toit, une cause nationale

Le 20 novembre, le collectif Jamais Sans Toit à été reçu à la Préfecture pour lui demander de travailler à des solutions d’hébergement en coopération avec la Métropole. Pour interpeller l’opinion générale, il a aussi imaginé un itinéraire bis de la Fête des Lumières à travers les différentes écoles abritant des enfants. Comme eux, de plus en plus de députés interpellent la Première ministre.

« C’est devenu un sujet, on aimerait maintenant que ça devienne une cause nationale, plaide Raphaël Vulliez. Il y a des solutions. 3000 enfants sans toit sur tout le territoire, c’est une goutte d’eau par rapport aux logements vides. On rappelle que la France est signataire de la Convention des droits de l’Enfant. Ce traité l’engage à tout faire pour les mettre à l’abri. »

Lire aussi sur Grains de Sel: C’est quoi la Conven­­tion inter­­­na­­tio­­nale des droits de l’en­­fant ?

Enfants sans toit à Lyon
© Mathilda Abou-Samra

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