Le Guide
des sorties et loisirs des familles
dans la métropole de Lyon
Éducation à la sexualité à l'école © Mathilda Abou Samra
Accueil Dossiers Éduca­­tion à la sexua­­lité : que fait l’École ?
Share

Éduca­tion à la sexua­lité : que fait l’École ?

Mis à jour le 25/01/2024

En mars 2023, trois asso­cia­tions portaient plainte contre l’État pour non respect de la loi instau­rant trois séances d’édu­ca­tion à la sexua­lité (EAS) par an à l’école. Un sujet primor­dial dans une société où les rapports femmes-hommes restent inéga­li­taires et où les jeunes sont confron­tés à des images porno­gra­phiques de plus en plus tôt. Or sur le terrain, le manque de forma­teurs et de cadre autour de l’EAS laisse les ensei­gnants peu armés pour ensei­gner une disci­pline couvrant des thèmes aussi vastes que sensibles. Certains s’en emparent toute­fois. Grains de Sel les a rencon­trés pour comprendre comment ils enseignent l’EAS, en école primaire et au collège.

Cet article fait partie d’un dossier plus large. Lire la suite sur Grains de Sel :
En mater­nelle, la notion de consen­te­ment dès 4 ans
– En primaire, des enfants très curieux !
À Vaulx-en-Velin, un collège prend l’édu­ca­tion à la sexua­lité à bras-le-corps

« Est-ce que faire l’amour, ça fait mal ?  » La ques­tion inno­cente d’une petite fille de CM1 à sa maîtresse peut gêner, elle en dit pour­tant long sur les repré­sen­ta­tions que certains enfants se font déjà de la sexua­lité. Nimbée de tabous, celle-ci peut deve­nir un sujet d’inquié­tude pour les plus jeunes, surtout lorsque des images véhi­cu­lant une vision biai­sée des rapports femmes-hommes et sexuels leur parviennent à travers les écrans. Démys­ti­fier la chose et se réap­pro­prier le sujet devient alors néces­saire pour proté­ger les enfants et repla­cer la sexua­lité dans une pers­pec­tive sereine et de respect.

C’est là le rôle des séances d’édu­ca­tion à la sexua­lité, inscrites dans le Code de l’édu­ca­tion depuis 2001. Au nombre de trois par an, elles sont censées être dispen­sées dès l’âge de 4 ans, de l’école au lycée. Pour­tant, le compte n’y est pas. En 2021, un rapport d’éva­lua­tion de l’Ins­pec­tion géné­rale de l’édu­ca­tion (IGÉSR) poin­tait que « moins de 15 % des élèves béné­fi­cient de trois séances d’EAS en école et moins de 20% en collège ». Face à ce constat, les asso­cia­tions Plan­ning fami­lial, SOS Homo­pho­bie et Sidac­tion ont porté plainte contre l’État en mars 2023.

Éduca­tion sexuelle: où sont les forma­teurs ?

« La loi est loin d’être appliquée, témoigne Léa Vedie Brete­cher, membre du conseil admi­nis­tra­tif du Plan­ning fami­lial de Lyon. Ce n’est pas faute de bonne volonté de la part du person­nel de l’Édu­ca­tion natio­nale. Mais par manque de person­nel formé pour mener les séances d’EAS. » D’après les textes, ces séances peuvent être assu­rées par le person­nel éduca­tif, le person­nel de santé scolaire comme les infir­miers·ères ou des inter­ve­nants exté­rieurs, dont les asso­cia­tions. Le Plan­ning fami­lial inter­vient lui dans les collèges. Pour­tant, il ne parvient pas à faire face à la demande. « En 2021, on a dû refu­ser 84 demandes en métro­pole lyon­naise, rapporte Léa. Ce n’est pas propre à Lyon mais valable dans toute la France et davan­tage le milieu rural. Il y a un manque de volonté de l’État qui ne donne pas de moyens pour former des forma­teurs·­trices. »

Si tous les ensei­gnants peuvent s’em­pa­rer de l’EAS, celle-ci ne figure pas en tant que telle dans leur forma­tion initiale. Seuls des modules consa­crés à l’édu­ca­tion à la santé ou aux rela­tions filles-garçons dans une entrée citoyen­neté sont propo­sés. Des forma­tions conti­nues existent : les acadé­mies en proposent à desti­na­tion du person­nel éduca­tif du premier et second degré. Il s’agit toute­fois de forma­tions non obli­ga­toires, aux places limi­tées et devant se faire sur le temps libre des ensei­gnants. Le rapport de l’IGÉSR appelle ainsi à « renfor­cer le déploie­ment des forma­teurs » et la forma­tion initiale du person­nel d’édu­ca­tion. Car l’EAS recouvre de vastes thèmes, mal défi­nis dans les textes légis­la­tifs. Lais­sant les ensei­gnants peu armés pour se les appro­prier.

Éduca­tion à la sexua­lité : de quoi on parle ?

En 2018, une circu­laire précise le péri­mètre de l’EAS . « Elle vise à la connais­sance, au respect de soi, de son corps et au respect d’au­trui, sans dimen­sion sexuelle stricto sensu à l’école élémen­taire. Elle est complé­tée, à l’ado­les­cence, par une compré­hen­sion de la sexua­lité et des compor­te­ments sexuels dans le respect de l’autre et de son corps. » Le texte situe enfin l’EAS au croi­se­ment des champs biolo­gique, psycho-émotion­nel et socio-juri­dique. Le premier englobe ce qui relève de l’ana­to­mie, la repro­duc­tion
et la préven­tion. Le deuxième, les émotions, les senti­ments et le respect de soi et des autres. Enfin, le champ juri­dique et social sensi­bi­lise les élèves aux ques­tions socié­tales comme l’éga­lité femmes-hommes, les violences sexistes et sexuelles, les risques liés aux images porno­gra­phiques, la lutte contre les LGBT­pho­bies, etc. Ainsi l’EAS aborde des sujets multiples, dont des ques­tions de société parfois déli­cates à trai­ter en classe.

Pour­tant le contenu de l’EAS reste flou aux yeux du grand public et parfois même des ensei­gnants. Si l’édu­ca­tion sexuelle au sens biolo­gique parle d’elle-même, l’EAS au sens large est diffi­cile à circons­crire. Nous avons d’ailleurs eu du mal à comprendre ce qui rele­vait de l’édu­ca­tion à la sexua­lité en primaire et en mater­nelle, le terme étant absent des programmes scolaires. Appe­lée plutôt «  éduca­tion à la vie » en primaire, rele­vant de l’ap­pren­tis­sage du « respect de l’autre » en mater­nelle, l’EAS se confond en appel­la­tions diverses et dans les ensei­gne­ments liés aux sciences ou à la santé, au détri­ment de séances clai­re­ment iden­ti­fiées. C’est que la loi de 2001 instaure trois séances sans préci­ser comment les appliquer…

Ensei­gner l’édu­ca­tion sexuelle, oui mais comment ?

Comprendre comment l’EAS est mise en œuvre ne fut pas chose aisée pour Grains de Sel. Il a été compliqué d’ob­te­nir des réponses claires tant dans les textes que du côté du recto­rat. Un manque de lisi­bi­lité que poin­tait déjà le rapport de l’IGÉSR, appe­lant à « clari­fier le cadre régle­men­taire » de l’EAS. En effet, celui-ci n’est décrit dans aucun docu­ment spéci­fique, sinon des circu­laires desti­nées aux acadé­mies. Un empi­le­ment épars et lacu­naire, peu clair sur la façon d’or­ga­ni­ser les séances, de les inté­grer à l’em­ploi du temps des élèves ou encore d’adap­ter l’édu­ca­tion sexuelle en mater­nelle.

La mise en œuvre de l’EAS dépend alors beau­coup de la bonne volonté du person­nel éduca­tif. Des ressources existent sur les plate­formes Edus­col ou Matilda pour prépa­rer et mener des séances d’EAS en classe. Mais il est parfois compliqué pour des ensei­gnants déjà surchar­gés de s’ap­pro­prier un sujet qui ne
figure pas expli­ci­te­ment dans les programmes scolaires. Aussi l’IGÉSR recom­mande-t-elle d’« iden­ti­fier clai­re­ment l’EAS et mieux la struc­tu­rer. » Mais aussi « de lui donner une véri­table place au sein de l’Édu­ca­tion natio­nale. »

Illus­tra­tion © Mathilda Abou Samra

Éducation à la sexualité à l'école © Mathilda Abou Samra

Vite ! Une idée de sortie en famille

Poterie, Judo, Arts du Cirque...

A découvrir également
Plus de publications à afficher
Consent choices