Perché sur les hauteurs de Saint-Just, le Nouvel Institut franco-chinois accueille actuellement une exposition d’une délicatesse absolue, consacrée au travail de l’artiste chinoise Ji Lingzi. Formée aux Beaux-Arts en Chine puis en France, à Besançon, la jeune femme vit aujourd’hui à Paris.
De l’art aux relations sociales
Parce qu’elle a ressenti dès l’enfance des difficultés face au groupe, elle a choisi de concentrer son travail sur cette notion et d’interroger la manière dont l’individu y trouve sa place et peut nouer une relation avec autrui. Comme pour disséquer ces questions qui l’intriguent, elle s’approche au plus près de son sujet, dans une démarche autant artistique que scientifique. Cela donne lieu à une ribambelle de silhouettes minuscules, qu’elle réalise à partir de colle à chaud dans des petits moules d’argile. Si les êtres nés d’un même moule apparaissent d’abord identiques, formant comme le corps d’une armée, ils se révèlent différents quand on les observe de près, tant leur aspect peut varier selon les accidents subis par la matière lors du processus créatif.
Seul ou ensemble
En complément de ces micro-structures, Ji Lingzi dessine et peint d’autres mini-personnages qu’elle découpe et colle au bout d’une épingle avant de les piquer en relief sur du papier.
Ainsi, l’œuvre monumentale Les Gens donne à voir une foule éparpillée, constituée de petits groupes et d’individus isolés comme vus d’en haut. Et pour cause : ce sont des gens qui traversaient ou stagnaient sur le parvis du centre Pompidou à Paris et que Ji Lingzi a photographiés de l’étage supérieur du musée. Ces touristes, familles en vadrouille, hommes et femmes en train de bavarder ou chargés de sacs de courses représentent des scènes de vie assez banales du quotidien et qui, pourtant, suscitent la curiosité. Qui sont ces gens ? Quelle est leur histoire ? Des questions auxquelles on peut demander aux enfants de répondre.
Pour petits et grands
Mais il faudra pour cela les inviter à faire quelque chose qui leur est a priori interdit dans un musée : s’approcher tout près de l’œuvre. Précision importante : chaque visite de l’exposition est accompagnée par une médiatrice et des ateliers gratuits, mêlant culture chinoise et pratique artistique, sont proposés aux enfants âgés de 5 à 10 ans. Xièxiè.
Les Foules, jusqu’au vendredi 1er avril, au Nouvel Institut franco-chinois, 2 rue Sœur Bouvier, Lyon 5e. Ouvert du lundi au vendredi de 10h à 18h, le samedi sur réservation. Entrée et visite guidée gratuites. Ateliers enfants (accompagnés d’un parent) : mercredis 2, 16 et 23 février, 9 et 23 mars, de 15h à 17h. Gratuit sur réservation. Tél. 04 81 65 84 60. nifc.fr
Un lieu à (re)découvrir
Méconnu des Lyonnais.es, le Nouvel Institut franco-chinois est vénéré en Chine. Ouvert en 1921 pour permettre aux étudiant.es chinois.es de venir poursuivre leurs études à Lyon, il fut fermé après la Seconde Guerre mondiale et l’arrivée au pouvoir de Mao Zedong qui rejeta toute ouverture sur l’Occident. C’est en 2014, lors de la venue à Lyon du président Xi Jinping, que l’Institut fut rouvert, avec un musée pour raconter les liens étroits entre Lyon et la Chine, depuis l’Antiquité, et un centre d’art contemporain. On y découvre, dans une installation émouvante, les visages et l’identité des 473 étudiants chinois, dont 52 femmes, passés par l’Institut et devenus ensuite pour certains des figures marquantes de leur pays. Ce qui en fait un lieu d’histoire et de mémoire extraordinaire pour la jeune génération actuelle.
Article rédigé par Clarisse Bioud et Monica Giordanelli • © DR