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Comment vont nos enfants ?

Publié le 11/06/2020

Elle est reve­nue comme une rengaine ces trois derniers mois, cette ques­tion : comment vont nos enfants ? Comment ont-ils vécu le confi­ne­ment, puis le décon­fi­ne­ment, le retour à l’école ou au contraire, l’im­pos­si­bi­lité d’y aller. Pour appor­ter quelques éléments de réponses, Grains de Sel a inter­rogé une psycho­logue, recueilli des témoi­gnages d’en­fants et ceux d’un person­nel éduca­tif qui, depuis le 16 mars, ne les a pas lâchés.

L’in­ter­view de Françoise Guérin, psycho­logue clini­cienne et roman­cière à Caluire-et-Cuire. 

Comment analy­sez-vous la réac­tion des enfants face au confi­ne­ment puis au décon­fi­ne­ment ?

Étran­ge­ment, ceux avec qui j’ai pu discu­ter ont très peu parlé du confi­ne­ment lui-même. Ils ont dit les surprises et les affres de l’école à la maison avec les parents qui sont débor­dés par l’am­pleur de la tâche ou qui perdent patience, l’éton­ne­ment de voir la maîtresse sur l’écran dans le salon, les copains qui manquent, le profes­seur d’édu­ca­tion physique qui envoie des chal­lenges spor­tifs rigo­los à faire dans sa chambre, la grand-mère qu’on appelle par Skype, les expé­riences culi­naires en famille pas toujours réus­sies…

Mais certains enfants en souf­france psychique ont aussi vu leurs angoisses régres­ser pendant le confi­ne­ment. C’est le cas de ceux pour qui l’école inclu­sive consti­tue, certes, une chance mais aussi une épreuve quoti­dienne car il faut se tenir au milieu de ses semblables, se plier à l’im­mo­bi­lité, travailler en silence, refré­ner ses émotions, suppor­ter la proxi­mité de l’autre, etc. On sous-estime les efforts que cela repré­sente. Pour eux, l’an­nonce du décon­fi­ne­ment a sonné parfois la fin de la pause.

Avez-vous noté de nouveaux troubles, de nouvelles peurs ?

À mon échelle, je ne peux que témoi­gner des préoc­cu­pa­tions de mes patients, jeunes ou adultes. Si le confi­ne­ment a pu, dans certains cas, renfor­cer les liens au sein de la cellule fami­liale, il n’est pas rare que la promis­cuité ait mis à jour les conflits larvés, que ce soit au niveau conju­gal ou entre parents et ados.

La drama­tur­gie fami­liale s’est jouée à huis-clos, sans échap­pa­toire possible, atti­sant les peurs de voir les couples se briser, les familles explo­ser, la violence intra­fa­mi­liale augmen­ter. C’est ce dont témoignent certains adoles­cents. Du côté des adultes, je constate que la charge mentale, durant la crise, a souvent pesé sur les femmes qui disent leur épui­se­ment d’avoir dû gérer les enfants, l’école à la maison, l’ap­pro­vi­sion­ne­ment, le ména­ge… tout en télé­tra­vaillant. 

On a aussi pu consta­ter des consé­quences posi­tives du confi­ne­ment dans les familles : plus d’ac­ti­vi­tés et de jeux parta­gés… Comment expliquer cela ? 

Oui, heureu­se­ment que tout n’est pas sombre et que, dans bien des cas, le confi­ne­ment a été aussi l’oc­ca­sion de se décou­vrir, de se racon­ter au sein de la famille, de créer, de jouer ensemble, parfois de faire bouger les places. Cela tient sans doute au temps retrouvé que les familles n’ont pas, habi­tuel­le­ment, sauf lors des vacances d’été. Adultes et enfants sont soumis toute l’an­née à des horaires soute­nus : c’est la course ! Est-ce bien la vie que nous voulons ?

Parmi les plaintes récur­rentes que j’en­tends habi­tuel­le­ment de la part des adultes ou des ados, il y a la fatigue et le manque de temps pour soi. Les enfants, eux, se plaignent souvent de n’avoir pas le temps de jouer.

Pour les enfants, les parents consti­tuent habi­tuel­le­ment des repères, qui rassurent. Mais comment rassu­rer quand on ne sait pas ? Comment compo­ser avec l’in­cer­ti­tude ?

C’est toujours ainsi. Être parent, c’est affron­ter ses doutes, faire avec l’ab­sence de certi­tude tout en s’em­ployant à voiler le réel pour que les plus jeunes l’af­frontent à petites doses. J’aime beau­coup cette phrase de Marcel Pagnol, à la fin du Château de ma mère. Alors qu’il égrène les pertes doulou­reuses qui se succèdent pour lui, il écrit : « Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effa­cées par d’inou­bliables chagrins. Il n’est pas néces­saire de le dire aux enfants.  »

Il s’agit donc de dire, mais pas tout. Pas trop. Culti­ver la joie tant que c’est possible, s’amu­ser d’un rien, inven­ter des histoires, puiser dans les contes et la culture de quoi prendre de la hauteur, proté­ger les plus jeunes des images et du vacarme du monde, prendre le temps de s’écou­ter, se dire qu’on s’aime même si ce n’est pas facile tous les jours…

Comment verba­li­ser les gestes barrières auprès des tout-petits, sans les trau­ma­ti­ser? 

D’abord, les enfants apprennent en obser­vant et en imitant. S’ils voient qu’on met un masque pour sortir, ils voudront sans doute en avoir un pour faire comme les grands. S’ils voient leurs parents éter­nuer dans leur coude, il y a fort à parier qu’ils le feront aussi, tôt ou tard. Et ainsi de suite.

Bien sûr, il faut leur parler de ce qui se passe, mais il est souvent plus effi­cace de leur faire expri­mer ce qu’ils savent. On est alors étonné de l’éten­due de leur savoir sur les choses qu’ils sont suppo­sés ne pas connaître. Il me semble qu’a­vant 3–4 ans, les enfants ne peuvent pas anti­ci­per tous les dangers. Le camion qui arrive à toute allure ne les effraie pas forcé­ment, alors un virus invi­sible, vous pensez bien !

Même si on leur inculque les gestes barrières, la pulsion de jouer et de toucher l’autre reprend vite le dessus. Car l’en­fant est un petit scien­ti­fique qui apprend en explo­rant. Tripo­ter, mettre à la bouche, reni­fler les objets, les compa­rer, etc. sont des façons de décou­vrir le monde. Courir, s’at­tra­per, se bagar­rer pour un jouet ou se faire des bisous, c’est rencon­trer l’autre. Autant dire que c’est vital et qu’il risque vite d’ou­blier les consignes. C’est donc aux adultes qui l’en­tourent de rester vigi­lants et calmes, en évitant quand c’est possible, les situa­tions où tout jeu est pros­crit. Mais chacun fait comme il peut, c’est impor­tant de le rappe­ler.

Les enfants ont pu être confron­tés de près à la mort, au moins à travers les discus­sions des adultes inquiets pour les personnes âgées de la famille. En auront-ils davan­tage peur doré­na­vant ?

L’ave­nir nous le dira. Le rapport des enfants à la mort est très complexe et chaque sujet se construit son chemin singu­lier avec cette ques­tion. Il est « normal » que la ques­tion de la mort surgisse de temps en temps, nous travaillons à l’ap­pri­voi­ser tout au long de notre vie. C’est un peu comme un livre qui ne nous quit­te­rait pas mais dont nous ne lirions que quelques pages, ici ou là, avant de le refer­mer et de l’ou­blier. Pour le rouvrir quelques mois plus tard et le refer­mer de nouveau.

Ce qui doit inci­ter à consul­ter, c’est plutôt quand la ques­tion de la mort se fait trop présente sur la durée. Le livre ne se referme pas, la mort empiète sur la vie, il faut se faire aider.

Comment ne pas en faire une géné­ra­tion d’an­gois­sés ?

Peut-être en trai­tant d’abord nos angoisses d’adultes. Qui n’en a pas ? Curieu­se­ment, nombreux sont les parents qui s’inquiètent de l’an­goisse de leurs enfants mais qui supportent la leur comme une fata­lité. L’an­goisse, ça se met au travail à tout âge, en théra­pie ou en analyse, ce ne sont pas les offres qui manquent. Et dans bien des cas, cela produit un allè­ge­ment pour soi et pour tout son entou­rage.

La mise en œuvre du proto­cole sani­taire dans les écoles impose des compor­te­ments qui vont à l’en­contre de ce qui aide l’en­fant à se déve­lop­per dans la sphère sociale. Crai­gnez-vous un repli sur soi ? 

C’est évidem­ment compliqué de répondre alors qu’on n’a, pour le moment, aucun recul. Bien sûr, c’est une école très éloi­gnée de ce qu’on peut attendre pour des jeunes enfants. Mais pour certains, c’est une façon bien­ve­nue de ressor­tir du cercle fami­lial qui peut être étouf­fant à la longue. D’ailleurs, des angoisses de sépa­ra­tion qui semblaient réglées peuvent ressur­gir à cette occa­sion.

Pour ce qui est des inter­ac­tions sociales, si on faisait confiance au savoir de l’en­fant ? J’ai entendu parler d’en­fants qui commu­niquaient par gestes avec le copain de l’im­meuble d’en face, pendant le confi­ne­ment. D’autres qui jouaient ensemble par écran inter­posé. J’ai moi-même, à mon actif, pas mal de séances de jeu très surpre­nantes avec mes petits patients confi­nés. Au télé­phone ou sur Skype, les enfants sont les cham­pions de la débrouillar­dise, émer­veillons-nous de leurs inven­tions et de leur désir de rencontre. Ils nous poussent en avant malgré nos réti­cen­ces…

Pensez-vous que les enfants ont un autre regard que le nôtre sur ce qui nous arrive ?

Il faudrait inter­ro­ger des enfants, on serait sans doute surpris de leurs réponses. Chiche, on leur donne la parole ?

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LA PAROLE AUX ENFANTS

Qu’as-tu aimé ou détesté pendant le confi­ne­ment ? Qu’est-ce qui t’a le plus manqué ? Comment se passe ton retour à l’école ? Grains de Sel a recueilli le témoi­gnage des enfants sur cette étrange période.

Hugo, 10 ans :

J’ai adoré me lever plus tard et regar­der plus de films pendant le confi­ne­ment. Mais j’avais vrai­ment envie de voir mes copains, alors vers la fin on s’ap­pe­lait tous les jours sur Skype. Je ne suis pas retourné à l’école: je suis à la campagne chez des amis, avec ma mère. Ma maîtresse m’en­voie les devoirs et s’il y a des choses que je ne comprends pas, je lui envoie des e-mails, et elle me répond.

Léon, 8 ans :

Mes parents sont méde­cins alors je suis allé à l’école tout le temps, sauf un jour, pendant le confi­ne­ment. C’était bien parce que je me suis fait deux nouveaux amis et, avec un anima­teur, on a fabriqué un super cerf-volant en sac poubelle et des shuri­ken en origami. Chez moi, on s’est installé un petit restau­rant dans la cour de l’im­meuble, on a même acheté des tran­sats. Ca y est, à l’école, j’ai retrouvé ma maîtresse et mes copains d’avant.

Lucie, 15 ans :

Le confi­ne­ment était comme une pause dans la vie. J’ai aimé me recen­trer sur moi et accor­der plus de temps à des petites choses dont je ne m’oc­cupe pas d’ha­bi­tude. C’est voir des gens qui m’a le plus manqué, ma famille, mes amis. C’était compliqué de travailler à la maison : j’ai décro­ché de certaines matières que je n’ai­mais pas. Je pense que c’est le cas de beau­coup de jeunes de mon âge.

Prune, 10 ans :

Ce qui m’a rendue triste pendant le confi­ne­ment, c’est l’an­nu­la­tion de la classe verte et des spec­tacles de fin d’an­née. J’en ai profité pour lire et jouer au badmin­ton sur la terrasse. J’étais contente de reve­nir à l’école et pas du tout stres­sée. En classe on est dix. C’est bien, le maître a plus de temps pour nous expliquer les choses.

Chloé, 6 ans et demi :

Pendant le confi­ne­ment, j’ai fait des vidéos sur WhatsApp avec mes copains, on voulait orga­ni­ser une grande fête pour après mais je ne sais pas si on va pouvoir la faire. C’est ma grand-mère qui m’a le plus manqué. Alors, je lui télé­pho­nais souvent. J’ai détesté quand mes parents travaillaient sur l’or­di­na­teur et n’étaient pas dispo­nibles. Je suis super contente de retour­ner à l’école. J’avais envie de faire un gros câlin à ma maîtresse mais c’est pas possible. À la récré, on joue au loup touche-touche qui ne se touche pas.

Sarah, 13 ans :

J’ai plutôt bien vécu le confi­ne­ment malgré le manque de mes proches et de mes copines. Le fait d’avoir des jour­nées construites et remplies comme à l’école m’a manqué aussi. Heureu­se­ment j’avais un jardin pour prendre l’air et j’al­lais courir un peu avec ma maman. Ce confi­ne­ment m’a permis de travailler à mon rythme.

Camille, 9 ans :

J’ai survécu au confi­ne­ment grâce à ma famille. J’ai eu du mal à travailler hors de l’école et j’ai passé beau­coup de temps dans ma chambre à jouer pour me sentir bien. J’ai aimé faire des gâteaux, des hambur­gers… d’ha­bi­tude c’est que pendant les vacances. De retour à l’école, j’ai retrouvé mon amie et on a inventé des “jeux de confi­ne­ment” comme le loup touche-touche, mais c’était pas drôle. On apporte chacune une corde à sauter et on fait une figure que l’autre doit repro­duire. On a prévu de jouer aux devi­nettes aussi.

Cléo, 4 ans :

J’ai aimé passer du temps avec mes parents et ma petite sœur, jouer dans le jardin et sauter sur le tram­po­line. Mais j’en avais marre de ne pas pouvoir sortir loin de la maison. Mes copines me manquent et les cours de danse aussi. Je conti­nue l’école à la maison avec papa quand il fait une pause. Il me tarde que ce “courant des russes” s’en aille ! 

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Et à l’école, ça se passe comment ?

Le début du décon­fi­ne­ment a été marqué par la réou­ver­ture des écoles puis des collèges. Au-delà des angoisses de leurs parents, et après deux mois de « classe à la maison », comment les enfants appré­hendent-ils cette drôle de rentrée ?

« Margot, qui est en CM1, ne voulait pas retour­ner à l’école, mais ses copines lui manquaient telle­ment au bout de deux mois qu’elle a changé d’avis. J’ai rappelé la direc­trice pour savoir si elle pouvait fina­le­ment venir », confie Antoine, son père.

Comme beau­coup de ses cama­rades, Margot reprend le chemin de l’école avec plai­sir. Peu importe les horaires éche­lon­nés de rentrée et de sortie des classes, la queue sur le trot­toir le matin avant d’at­teindre le portail et le gel hydro-alcoo­lique vapo­risé sur les mains. Peu importe le masque porté par la maîtresse. Le lien tissé avec l’en­sei­gnante, déjà très fort en temps normal, s’est renforcé pendant le confi­ne­ment.

Un lien renforcé avec le person­nel éduca­tif

« On avait reçu comme injonc­tion du minis­tère d’ap­pe­ler régu­liè­re­ment nos élèves dans le cadre de la conti­nuité péda­go­gique, indique Barbara Gachet, ensei­gnante d’une classe de CP-CE1-CE2 à l’école Robert-Dois­neau (Lyon 1er). Je leur ai télé­phoné chaque semaine. Pour les élèves en réus­site scolaire, il s’agis­sait de prendre des nouvelles. Pour les autres, je véri­fiais avec eux qu’ils arri­vaient bien à faire leurs exer­cices.  » Une « école par télé­phone » néces­saire, surtout quand la famille ne dispose pas d’In­ter­net ou d’or­di­na­teur.

Si ces appels permettent à l’en­sei­gnante de véri­fier le travail et le moral de ses élèves, ils la renseignent aussi sur l’am­biance à la maison : « Je me suis retrou­vée à rentrer dans les vies de famille. Je trou­vais parfois des parents effon­drés qui avaient un énorme besoin de parler, notam­ment des mamans seules avec leur enfant. Au contraire, d’autres évitaient les conver­sa­tions. Je n’ai jamais forcé la main. Ce temps de confi­ne­ment était si parti­cu­lier que je ne voulais pas entrer dans un conflit, mes appels devaient être rassu­rants. Ces familles-là, je les appe­lais à jour et heure fixes. Je sentais que c’était extrê­me­ment impor­tant pour l’en­fant car c’était son moment à lui.  »

Ce lien renforcé et cette évolu­tion de la rela­tion avec les familles, Audrey Saim­pont, conseillère prin­ci­pale d’édu­ca­tion (CPE) au collège Jean-Perrin (Lyon 9e), l’a aussi constaté : « On a passé beau­coup de temps à soute­nir les parents dont beau­coup étaient angois­sés par la situa­tion. Ils nous appe­laient en nous disant qu’ils ne s’en sortaient pas, y compris ceux dont on n’en­ten­dait pas parler avant.  » Elle a senti qu’elle faisait le tampon entre la prin­ci­pale du collège que les parents n’osaient pas contac­ter direc­te­ment et les profes­seurs contre lesquels ils crai­gnaient de se fâcher au risque que cela retombe sur leur enfant.

Les élèves, à qui elle a excep­tion­nel­le­ment permis de lui écrire, l’ont aussi contac­tée : « Sans me dire grand chose, ils prenaient de mes nouvelles.  » Et elle aussi les a appe­lés, parfois de sa salle de bain où elle s’en­fer­mait pour être tranquille : « C’était complè­te­ment nouveau pour moi de leur parler autant ! Comme les profs, j’ai dû m’adap­ter et brico­ler mes missions de CPE.  »

Pour faire reve­nir les élèves, la commu­ni­ca­tion avec les familles a encore joué un rôle clé. Comme à l’école primaire, et avant même que la région passe en vert, un sondage leur a été envoyé, ainsi qu’un cour­rier expliquant préci­sé­ment comment les enfants seraient accueillis.

Chaque jour, Audrey Saim­pont consul­tait les réponses au sondage et appe­lait les familles n’ayant pas répondu : « En discu­tant, je prenais connais­sance de certaines situa­tions diffi­ciles, de la fragi­lité de parents qui ne voulaient pas nous envoyer leur enfant. J’ai eu une maman qui ne se disait pas prête, mais ses enfants se chamaillaient telle­ment pendant que nous parlions qu’elle a craqué et laissé reve­nir sa fille !  » 

Des élèves qui vont bien… à l’école

Le jour de la rentrée, la CPE a trouvé que les élèves prenaient la mesure de la gravité de la situa­tion et de l’as­pect solen­nel de ce retour au collège : « Mais ils ne sont jamais seuls, on les accom­pagne dans chacun de leurs dépla­ce­ments. Et ils arrivent et repartent avec le souri­re… enfin je le devine sous leur masque !  »

De son côté, Barbara Gachet qui atten­dait avec impa­tience de revoir ses élèves, les a trou­vés « bien blancs, mais ravis de reve­nir.  » La salle de classe a été aména­gée confor­mé­ment aux exigences du proto­cole sani­taire établi par le minis­tère de l’Édu­ca­tion natio­nale, avec des bureaux indi­vi­duels espa­cés d’au moins un mètre les uns des autres. « Je suis épatée par leur respect des distances et la façon dont ils ont inté­gré les gestes barrières, note l’ins­ti­tu­trice. Même dans la cour, que nous avons sépa­rée en deux, ils font du mieux qu’ils peuvent, avec beau­coup de bien­veillance entre eux.  » À la récré, le tradi­tion­nel Loup touche-touche s’est trans­formé en « Covid-19 pas touche » !

Les premiers jours, elle avait prévu de leur faire expri­mer leurs émotions vis-à-vis de ce qui s’est passé, en s’ap­puyant sur une bande-dessi­née. Mais entre confi­ne­ment et décon­fi­ne­ment, leurs souve­nirs se mélangent : « C’est assez flou pour eux, mais tous se souviennent de leur première sortie sans attes­ta­tion, et beau­coup racontent le jour où ils ont pu revoir leurs grands-parents.  » En tout cas, aucun ne souhaite reve­nir sur le passé : « Ils vont de l’avant, ce qui les inté­resse, c’est ce qu’on fait tout de suite main­te­nant !  »

Si ces enfants-là vont plutôt bien, qu’en est-il de ceux, encore nombreux, restés chez eux ? « Ce sont les plus fragiles qui ne sont pas reve­nus, souvent parce que leurs parents ont encore trop peur de fran­chir le cap du retour en classe.  » Or, pour beau­coup de ces élèves, la diffi­culté de suivre la classe à la maison s’est ampli­fiée. « On les perd  », admet l’en­sei­gnante, qui conti­nue de les appe­ler chaque semaine et espère que les choses se rattra­pe­ront en septembre.

Pour ceux qui sont en diffi­cul­tés scolaires mais dont les parents ont accepté le retour en classe, la situa­tion de l’école où elle exerce leur est plutôt favo­rable puisque, comme les enfants de soignants ou d’en­sei­gnants, ils sont consi­dé­rés prio­ri­taires et, à ce titre, « peuvent venir quatre jours à l’école, dont deux avec leur ensei­gnant habi­tuel. Le reste du temps, les autres ensei­gnants et les anima­teurs leur portent une atten­tion parti­cu­lière.  » 

Le lien avec les familles et l’at­ten­tion portée aux élèves jusqu’au dernier jour de classe (distan­ciel ou présen­tiel) : voilà ce qui devrait aider les enfants à aller le mieux possible, à l’heure où le décon­fi­ne­ment s’élar­gis­sant, la vie semble reve­nir tout douce­ment à la normale.

Par Clarisse Bioud et Gaëlle Guitard

Illus­tra­tions : Marin et Sido­nie / Anne de Lagonde


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