D’où vient votre goût pour la cuisine?
Ma grand-mère était cuisinière et j’ai toujours cuisiné avec elle. Je ne savais pas marcher qu’elle me mettait dans une grande bassine avec la semoule! Mes parents aussi cuisinaient beaucoup. On habitait à la campagne côté Isère, dans une grande maison coincée entre quatre fermes. Un environnement propice aux bons produits. Dans ma famille, on aime manger. Chez ma grand-mère, de culture nord-africaine, quand on se réveillait le matin, ça sentait déjà bon dans la maison.
Quand avez-vous décidé d’en faire votre métier?
Moi, je voulais partir en cuisine après la 3e, mais mes parents préféraient que je passe par un parcours plus général. Mais en Terminale, je voulais toujours faire de la cuisine! Mon père, qui est horticulteur, m’a emmenée voir l’un de ses “collègues”, Christophe Marguin, des Toques Blanches. Je m’en souviens très bien: il m’a demandé pourquoi je voulais faire de la cuisine, m’a décrit ce qui était beau et moins beau dans ce métier. Puis, il m’a dit: “Tu es une fille, tu fais 1m55, tu es prête? Oui ? Alors c’est parti !”
Qu’est-ce qui vous a conduit à fonder Nos P’tits Chefs?
Je suis devenue cheffe de la cuisine d’un groupement de crèches associatives. Mais la diversification alimentaire, ce n’est pas un chapitre à l’école et c’est bien dommage ! Alors je me suis formée, parce qu’en tant que cuistot, il faut toujours avoir la curiosité d’apprendre.
Quand je me suis retrouvée à cuisiner directement dans les crèches, j’ai pensé que ce serait sympa de faire participer les enfants à l’élaboration des repas. J’ai commencé à faire des caviars d’aubergine, des houmous… On a vu des enfants de 2 ans qui n’avaient jamais mangé de morceaux s’enfiler le pot de caviar d’aubergine! Le personnel et les parents n’en revenaient pas!
Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire avec les enfants. On leur dit de ne pas jouer avec la nourriture, mais ça peut être un jeu de préparer son repas!
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Pensez-vous que cuisiner avec les enfants change leur rapport à l’alimentation?
Bien sûr ! En fait, on commence déjà à manger quand on cuisine: on a des odeurs, on touche des textures, on goûte… Cuisiner participe à l’éveil des sens. Après, il y a un aspect très psychologique dans l’alimentation. Pas mal de parents viennent en atelier en me disant que leur enfant est hyper sélectif. Ils veulent savoir si le fait de cuisiner ensemble va l’aider à accepter plus d’aliments. Je dis toujours que ça dépend du problème de fond et leur conseille de consulter un professionnel de santé en essayant, en parallèle, de cuisiner à la maison avec leur enfant.
Les enfants manipulent beaucoup dans vos ateliers et stages.
Ah oui toujours! Il y a évidemment des moments où on est dans la démonstration. Que les enfants aient 18 mois ou 8 ans, je ne les laisse pas faire un caramel! Mais chaque atelier est le fruit d’une grosse réflexion : comment proposer une recette qui soit ludique, qui plaise aux enfants et qui lui permette de participer? Comme je leur dis: “Moi, je vous prépare tout et après c’est vous qui travaillez !”
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Vous n’hésitez pas aussi à leur faire passer des messages!
On essaie de sourcer un maximum de produits, dans la région ou du moins en France. Pas parce que c’est bien vu, mais parce que ça compte pour nous. Et puis cuisiner, c’est une démarche militante ! Quand on cuisine, on achète un produit, on rémunère quelqu’un et une manière de récolter derrière… C’est important de l’expliquer aux enfants.
Je suis totalement d’accord avec le chef Thierry Marx quand il dit qu’il faudrait mettre des cours de cuisine à l’école. Aujourd’hui, à 10 ans, sept enfants sur dix ne savent pas faire la différence entre un concombre et une courgette! Alors oui, en atelier, on va parler des labels, du nutristore, des calories, apprendre à lire une étiquette, comprendre ce qui est bon pour son corps… mais en restant ludique et dans la pratique!
Quelle est l’offre végétarienne dans vos ateliers?
C’est très rare qu’on propose des ateliers avec de la viande ou du poisson, pour permettre à tous les enfants d’y participer. Quand on utilise de la viande, elle est locale. Pour le poisson, on va préférer la truite qui est pêchée pas loin. A 90%, nos ateliers sont végétariens parce qu’on utilise des oeufs, du miel etc. Mais on propose aussi des ateliers à thématique vegan et sans gluten ou sans lactose pour les intolérants. On essaie que tout le monde puisse venir un jour cuisiner avec nous, que chacun trouve chaussure à son pied… ou spatule à son bol !
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L’an dernier, vous avez ouvert la masterclasse Nos P’tits Chefs que vous reconduisez en septembre. A qui s’adresse-t-elle?
Aux enfants que je voyais revenir dix fois dans l’année, en atelier et en stage! J’ai eu envie de leur créer une activité régulière, dans une classe spéciale. Ces enfants sont incroyables ! Deux d’entre eux, à 10-11 ans, savent déjà qu’ils veulent devenir cuisinier ou pâtissier. L’un d’eux m’a dit: “Je termine la 3e, je pars en CAP cuisine et à 25 ans j’ouvre un gastro en Angleterre!”
Qu’est-ce qu’ils apprennent exactement?
Je me base sur le programme du CAP: toutes les pates, les sauces de base… Et on transforme tout ça de manière ludique car on apprend en faisant. Ils sont au contact de plusieurs chefs: Damien Ottavioli qui est boulanger, Aline Sanchez, pâtissière chocolatière… On fait aussi des ateliers un peu inédits dans l’année, comme une visite de la Cité de la Gastronomie ou, en septembre, des ruches qu’on a parrainées à la Tour du Pin. Les enfants sont dans une vraie démarche d’apprenant. On ne patouille pas!
Quels est votre plat préférés? Et celui que vous détestez?
Mon plat préféré, ce sera toujours le couscous de ma grand-mère. Pour le dessert, je suis citron addict, donc une tarte au citron. Mais après j’aime les choses très simples: une tomate qui sort du jardin avec un peu d’huile d’olive, ça me va bien! Je ne déteste rien parce que je pars du principe qu’il faut pouvoir goûter de tout. Mais bon, j’ai quand même du mal avec tout ce qui est tripaille!
Nos P’tits Chefs, chez La vie en soie, 251 rue marcel Mérieux, Lyon 7e. [email protected]. Ateliers de cuisine en famille ou enfant (6 mois-12 ans) : 35€. Stages enfant (6-12 ans) : 59€ la 1/2 journée, 79€ la journée. Masterclasse (6-12 ans): 540€ les 10 ateliers (un samedi par mois de 14h à 17h). nosptitschefs.com
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