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Loca Loca Boutique Seconde Main Enfants à Lyon © Tom Augendre
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Un Noël seconde main écologique et économique

Mis à jour le 25/10/2023

À l’approche des fêtes, dans un contexte de crise écologique et d’inflation qui pèse sur le prix des jouets, des acteurs locaux invitent les Lyonnais.es à choisir la seconde main pour Noël. Écologique et économique, l’occasion est dynamique à Lyon où les initiatives trouvent un soutien financier. Elle s’organise aussi au niveau national, avec la lente mise en place d’une filière REP Jouets (responsabilité élargie du producteur), qui contraint les fabricants à prendre en charge la fin de vie des jouets en favorisant le réemploi. À Lyon, Villeurbanne et Villefranche, certains travaillent déjà à cette économie circulaire.

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Nous y sommes… Décembre ! À la télévision, les publicités de jouets ont donné le coup d’envoi de la période de Noël. Dehors, les rues se parent de décorations lumineuses, émerveillant les enfants, mais rappelant aux parents dans un clignotement obsédant qu’il est temps d’acheter les cadeaux… Derrière ces lumières pourtant, l’actualité n’est pas aussi brillante. Crise écologique et inflation ont de quoi gâcher l’ambiance. Car les joujoux n’échappent pas à la hausse des prix. Président de la Fédération des commerces spécialistes des jouets et PDG de l’entreprise iséroise King Jouet, Philippe Gueydon annonce en effet pour le secteur une inflation de 6 % en 2022. Les jouets importés d’Asie sont les premiers concernés par cette hausse de prix. À l’inverse, les plus épargnés sont les jouets français, dont les coûts de transport sont moindres.

Le coût écologique des jouets

Qu’on soit inquiet pour son porte-monnaie ou pour l’impact environnemental d’une consommation qui atteint son pic lors des fêtes de fin d’année, les courses de Noël se feront peut-être avec un brin moins d’insouciance cette année… Astrid Faure, co-fondatrice de la maison d’édition lyonnaise En Cavale qui conçoit des enquêtes ludiques pour les enfants, appelle de ses vœux cette consommation sobre et raisonnée. « Trop de ces jouets qui font rêver les enfants font aussi parfois cauchemarder la planète, écrit-elle avec sa collègue dans une tribune publiée en novembre appelant à « un Noël qui ait du sens« . Des jouets qui pourraient être fabriqués ici sont fabriqués ailleurs, souvent avec des matériaux non responsables et dans des conditions déplorables. »

Selon une étude de l’Ademe, plus de 150 000 tonnes de jouets sont mises sur le marché en France chaque année, dont 90 % sont importées, bien souvent d’Asie. De la fabrication au transport, cette surproduction génère de la pollution. Mais la fin de vie des jouets est elle aussi en cause: environ 1,27 jouet part à la poubelle toutes les secondes, soit 40 millions chaque année, selon les chiffres annuels de la Fédération du jouet. Un chiffre colossal quand on sait que seulement 4 % des jouets sont effectivement réemployés aujourd’hui, alors même que leur part de recyclabilité est estimé à 35 %. Parmi eux, seulement 16 % des jouets en plastiques sont recyclés, le reste étant fabriqué dans un mélange de plastiques qu’on ne sait pas traiter.

Jouets seconde main revalorisés à Enjoué
Jouets revalorisés dans l’atelier Enjoué © Gilles Malandrin

À Lyon, des marques appellent à un Noël responsable

« Je suis triste de voir où on en est arrivé. Ce n’est pas normal que ça se passe comme ça. Les gens savent qu’il faut changer de mode de consommation, mais ils ne sont pas toujours bien informés », se désole Astrid. C’est donc pour sensibiliser qu’En Cavale a publié sa tribune portée par le collectif Tous pour un. Créé pour l’occasion, ce collectif regroupe plusieurs marques françaises de jeux et jouets éco-responsables, comme Le Jouet Simple qui fabrique en France des jouets en plastiques recyclés et recyclables, et Loca Loca, boutique lyonnaise de seconde main. Tous soulignent le rôle des fabricants de jouets « face à l’urgence climatique et aux dérèglements économiques ». Et les appellent à « produire plus local et remettre en place de véritables filières pour des matériaux plus responsables. »

Mais la tribune invite aussi à changer les modes de consommation. « D’achats en quantité, il faut pouvoir privilégier la qualité en prônant une nouvelle forme de sobriété », préconise-t-elle. Un appel à soutenir les marques françaises, mais aussi à  « redonner son sens à Noël qui est d’abord un rassemblement et un partage, rappelle Astrid. On peut très bien rêver sans avoir tout le catalogue de jouets, en offrant des expériences, de la confection ou de la seconde main. »

La seconde main, amie du porte-monnaie et de l’environnement

C’est dans cette dernière catégorie que s’est engagée Alexandra Delprat. En 2018, cette ex ingénieure a fondé l’association AbracadaBric dans l’Ain pour collecter et remettre en état des jouets d’occasion, tout en donnant un travail à des femmes éloignées de l’emploi. Son objectif : sauver le plus possible de jouets, car « beaucoup sont condamnés pour une égratignure ou une pièce manquante », déplore-t-elle. Pour leur donner une seconde vie, les salariées d’AbracadaBric bichonnent les jouets, les réparent, les nettoient, les complètent, testent leur sécurité et les emballent. Le tout est vendu dans une boutique à Villefranche, 40 % moins cher que le prix du neuf. Alexandra en est convaincue : « La meilleure façon de consommer, c’est la seconde main ! Au-delà de la vertu économique, il y a une vertu écologique. »

L’Ademe estime en effet qu’environ 50 % des jouets dont se défont les familles sont réemployables. « Sur les 100 000 tonnes [annuelles] de jouets arrivant en fin de vie. Ce sont donc environ 50 000 tonnes qui seraient réemployables contre environ 4 500 tonnes réemployées aujourd’hui », précise l’agence dans une étude. Annouck Blanchouin connaît l’équation par coeur : « À Noël, si chaque enfant reçoit trois cadeaux neufs, ça fait 200 000 articles produits pour la seule ville de Lyon, calcule la jeune femme. Écologiquement, on ne peut plus. C’est indispensable de passer à ces économies circulaires. »

Alors cette entrepreuneuse lyonnaise a fondé Loca Loca, une boutique de vêtements de seconde main pour enfant à Lyon 1er et récemment Lyon 7e. Elle y rachète au kilo les vêtements des particuliers et les revend moitié moins cher que le neuf. « Il y a déjà assez de ressources sur le territoire, affirme-t-elle. Lyon compte près de 70 000 enfants. En termes de vêtements, il y a largement de quoi faire, il suffit de faire circuler ! » Depuis le début de l’aventure, Loca Loca revendique plus de 10 000 habits revendus. Soit 12 millions de litres d’eau économisés, 350 millions de kilomètres non parcourus et plus de 100 kilos de pesticides non déversés dans la nature. « Mais c’est aussi 0,000 19 % des vêtements vendus en France en une année », conclut-elle.

Loca Loca Boutique seconde main Enfants
Loca Loca, boutique du 7e arrondissement © Tom Augendre

Rendre la seconde main sexy

Car la seconde main doit encore se défaire de sa mauvaise image. « L’occasion a longtemps été attribuée au fait de ne pas avoir les moyens, explique Annouck. Aujourd’hui, il faut rendre la seconde main sexy ! Avant, l’occasion, c’était Emmaüs. Puis Vinted est arrivé et ça l’a complètement démocratisée. » Alors Annouck sélectionne, lave et défroisse précautionneusement chaque pièce. Elle apporte le même soin à ses boutiques, chaleureuses et joliment décorées à base de matériaux de récupération ou ultralocaux. « Ce qu’il faut, c’est que les gens se sentent aussi bien dans une boutique de seconde main que dans une boutique de neuf », sourit-elle.

Quant à offrir du seconde main à Noël, « il ne faut pas hésiter à en parler, encourage-t-elle. On a peur d’avoir l’air radin. Mais en fait de plus en plus de personnes demandent à se faire offrir du seconde main. Et quand elle revêt l’image d’un acte d’achat conscient et engagé, elle n’a plus du tout cette image pingre. » Alors qu’AbracadaBric aborde son cinquième Noël, Alexandra confirme : « Les gens ont beaucoup moins de freins à offrir des jouets seconde main. C’est un vrai changement d’habitude et je trouve que notre mission c’est d’accompagner ce changement. L’occasion, c’est joli, c’est sûr, c’est propre ! Le marché de l’automobile l’a bien fait et on ne se pose pas mille questions ! »

Rendre la seconde main pérenne

Toutefois, « l’économie circulaire est un modèle fragile qui reste à inventer », reconnaît Alexandra. Anouck explique : « Dans l’économie du réemploi, c’est compliqué d’être rentable, car on paie un service plus qu’un produit. Les temps à non-valeur ajoutée sont énormes. On vérifie les vêtements un à un, puis on les lave, on les plie, on les défroisse, on les étiquette… Tout ça demande deux à trois fois plus de temps que le neuf et on vend à moitié prix. » L’autre grand défi de la seconde main est donc de trouver un modèle pérenne. Alors, avec Loca Loca, Annouck tente de rentabiliser la chaîne logistique, sans transiger sur les valeurs. « Toutes mes décisions, je les prends pour avoir le moins d’impact environnemental, mais le plus d’impact économique. Le but c’est de mettre au point des chaînes de distribution optimales pour créer un modèle économique circulaire duplicable dans d’autres villes. »

Par chance, « à Lyon, il y a un bon écosystème de la seconde main et du réemploi, se félicite Gilles Malandrin, cofondateur de l’entreprise Enjoué à Villeurbanne. La Métropole, la Ville de Lyon et la Ville de Villeurbanne sont des soutiens dynamiques. Sans elles, on ne pourrait pas exister. » Elles ont permis de lancer Enjoué en 2020, un atelier de collecte et de valorisation des jouets inscrit dans un projet de lutte contre le chômage longue durée dans le quartier Saint-Jean à Villeurbanne. « On a constaté que les jouets ont une moyenne d’utilisation de 7 mois alors qu’ils ont une durée de vie de 10 ans, expose Gilles. Ces jouets dorment des années dans les placards et lorsqu’ils sont enfin donnés, ils ne sont plus à la mode ou en état. On voulait donc susciter le don pour que les jouets circulent avant de devenir un déchet. » Une fois remis à neuf, le jouet rejoint la boutique en ligne d’Enjoué, 50 à 60 % moins cher que le neuf. Et d’après Gilles, le secteur du réemploi est en pleine croissance.

Jouets revalorisés par Enjoué © Gilles Malandrin

Loi sur l’économie circulaire, le secteur du jouet se mobilise enfin

Au point que même les grandes enseignes s’y mettent. Cet été, King Jouet a créé sa marque seconde main : King Okaz. Depuis mai, sept magasins ont ouvert en France, dont deux dans la région à Mâcon et Valence. Les produits King Jouet y sont collectés en échange d’un bon d’achat, reconditionnés et mis en vente 50 % moins cher. Une première sur ce secteur du jouet. Pourtant, voilà bientôt un an qu’il est tenu de prendre en charge la fin de vie de ses produits. Au 1er janvier 2022 devait débuter la mise en place d’une filière REP Jouets prévue par la loi AGEC (anti-gaspillage et économie circulaire) du 10 février 2020. Celle-ci donne la responsabilité aux fabricants et distributeurs de gérer la fin de vie des produits en favorisant le réemploi. Pour ce faire, ils peuvent mettre en place un système individuel ou collectif en sollicitant un éco-organisme agréé par l’État. « On a beaucoup de retard dans l’application de cette loi car les points de collecte ne sont pas au point et les ateliers de revalorisation sont encore trop peu nombreux en France pour absorber les flux », doute Alexandra.

Mais aujourd’hui, le secteur s’organise. Le 24 novembre, la Fédération française des industries Jouet-Puériculture (FJP) et la Fédération des Commerces spécialistes des Jouets et Produits de l’Enfant (FCJPE) présentaient, lors d’une conférence de presse, les initiatives des fabricants et distributeurs à l’occasion du lancement de la REP Jouet. À leur côté, l’éco-organisme Ecomaison, choisi pour organiser le tri, la collecte, le réemploi et le recyclage des matériaux et objets. « Aujourd’hui, 4 % des jouets mis au rebut sont réemployés, a introduit sa présidente Dominique Mignon. Notre objectif est de tripler le nombre d’objets réemployés, avec priorité au don solidaire, à l’occasion et au recyclage pour à la fin valoriser plus de 90 % des jouets. De 4 millions de jouets réemployés aujourd’hui, on veut passer à 8 millions en 2024. » Déjà 8 500 adhérents et 600 entreprises ont rejoint Ecomaison à ce jour. « La profession est unie pour avancer ensemble sur ce sujet, car l’ambition est bien au-delà des enjeux concurrentiels commerciaux, » a affirmé Dominique Mignon.

Coopérer avec l’économie sociale et solidaire

Dès 2024, un tiers des jouets mis sur le marché devront être annuellement collectés, soit environ 33 000 tonnes. 20 % devront être à terme réemployées, notamment par des structures de l’économie sociale et solidaire. Gilles suit les avancées de près. « Ecomaison est en train d’informer les acteurs du réemploi pour voir comment on peut collaborer », confie-t-il. Car l’éco-organisme prépare déjà le déploiement de la collecte des jouets pour 2023 en magasin, en déchetterie, auprès des associations, des écoles et des collectivités locales. Objectif: 6 000 points de collecte en 2023. Déjà 1 500 points seront effectifs l’année prochaine via des partenariats avec l’économie sociale et solidaire. Une application de géolocalisation de ces points de collecte sera disponible le 1er janvier 2023 pour les particuliers, avec des pictogrammes pour indiquer quels jouets peuvent être déposés. Un observatoire du réemploi, mis en place par l’Ademe sous l’égide du Ministère de l’écologie, comptabilisera les jouets vendus en occasion.

Un « fond réemploi » sera aussi lancé pour financer ce système, aujourd’hui abondé de 23 millions d’euros versés par les fabricants et les distributeurs. La loi stipule que 5 % minimum doit être consacré aux acteurs de l’économie sociale et solidaire. « Toutes les associations solidaires de retour à l’emploi sont invitées à s’inscrire chez nous pour qu’on leur affecte des points de collecte et seront subventionnées », a déclaré la présidente d’Ecomaison. Pour Gilles en effet, « l’avenir de ce secteur dépend du modèle économique qu’on se donne et du soutien financier qu’on lui apporte. Car le réemploi est coûteux en main d’œuvre et en espace de stockage. L’éco-organisme devra prendre cela en compte. Pour l’instant, nous sommes en négociations. Mais je suis confiant. » Une confiance que s’autorisent les associations aujourd’hui que les actes suivent des paroles. « On fabrique et on distribue des jouets pour les enfants pour les accompagner à grandir, plaide Philippe Gueydon, président de la FCJPE et directeur de King Jouet. Alors s’engager sur ces sujets est un devoir. »


Loca Loca, 123 rue Sébastien Gryphe, Lyon 7e.

Boutique AbracadaBric: 264 rue Nationale, Villefranche-sur-Saône.

Enjoué, en ligne sur enjoue.org, dans les magasins Loca Loca, Envie, ou en décembre . la Part-Dieu.

Loca Loca Boutique Seconde Main Enfants à Lyon © Tom Augendre
Loca Loca Boutique Seconde Main Enfants à Lyon © Tom Augendre

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